Comment une petite startup française s’est retrouvée en Chine

Shoette est une petite startup, initialement composée de jeunes femmes dynamiques qui courraient toute la journée et toute la soirée en superbes chaussures à talons hauts, de la maison au bureau, du bureau au café avec les copines, du café à la maison, puis au restaurant, et certaines fois en discothèque.

L’idée de base de Shoette est de trouver une solution pour rester glamour et ne plus avoir mal aux pieds en chaussures à talons.Il se trouve que nous avons choisi de commencer notre activité avec la première solution que nous avons trouvé pertinente (parmi une liste de solutions originales, farfelues, parfois irréalisables, parfois pourries, parfois déjà existantes, parfois déjà existantes et pourtant pourries mais on ne citera personne). Cette première solution pertinente est : des petites chaussures de secours confortables et féminine, à toujours avoir dans son sac à main.

De là, nous avons déroulé le concept pour en déduire les caractéristiques de la chaussure:
– elle doit pour voir se transformer en tout petit pour tenir dans tous les sacs à main de femme
– elle doit être propre dans nos sacs à main
– elle doit être légère à porter
– elle doit être confortable, puisqu’elle ne sera portée qu’à un moment où nous avons déjà mal aux pieds
– elle doit être féminine (si nous avons mal, c’est que nous portons des chaussures douloureuses, si nous les portons alors qu’elles sont douloureuses c’est qu’elles sont suuuuuuper belles et que nous sommes prêtes à souffrir pour être stylée, donc nous faisons parti de ces femmes pour qui il est hors de question d’être mal fagoté – du moins en public).

De là, nous avons cherché à fabriquer en France. Nous avons eu la chance de nous rapprocher de la Fédération Française de la Chaussure, du Centre Francilien de l’Innovation et de Le Lieu Du Design (qui travaillent ensemble). Grâce à eux et grâce aux salons professionnels où nous nous sommes rendus, nous avons pu rencontrer plusieurs fabricants de chaussure français. Après 6 mois de recherche, de rencontre, d’entretiens, d’attente, de coups de fils manqués, et de partenariats impossibles, nous avons vu à quel point il était compliqué pour une petite startup qui ne connaissait rien à la chaussure de faire fabriquer quelque chose de nouveau. Simple certes, mais nouveau, c’est à dire pour lequel il n’existait pas de moule ou de patron pré-existant. Nos quantités sont trop petites, notre forme n’est pas celle qu’ils sont habitués à couper, la technique de fabrication souhaitée pour que les ballerines Shoette puissent être enroulées dans les deux sens n’est pas usuelle pour une usine française, et nos objectifs de prix sont trop faibles. Si à cela vous rajoutez le fait que nous voulions 5 tailles différentes (34/35, 36/37, 38/39, 40/41 et 42/43) là vous aviez un « non ce n’est pas possible » droit et massif. Et je ne vous parle même pas d’échantillon gratuit, ou pire, de délais!

Puis nous avons eu la chance de rencontrer le patron d’une grosse société industrielle française (dont nous n’avons pas le droit de dire le nom pour ne pas associer nos deux marques à l’image très différente) mais que nous remercions beaucoup. Depuis plus de 30 ans, sa société conçoit ses vêtements en France et les fait fabriquer dans plusieurs pays dont la Chine. Il nous a gentiment demandé : « Vous voulez vraiment monter une startup ou vous préférez travailler sur un projet étudiant qui n’aboutira jamais? Parce que aujourd’hui vous êtes des étudiants avec un projet dans la tête. Pour devenir une société, il vous faut un premier produit, un site internet marchand, et des premiers clients. Là vous verrez si le concept plait. S’il plait, vous récolterez les critiques de vos clients et vous pourrez prendre le temps de concevoir de meilleurs produits par la suite. Le mieux est l’ennemi du bien, si vous perdez encore plus de temps avant de lancer votre société, vous risquez de ne jamais la lancer ». Comme il avait raison! Dans les semaines qui ont suivi, il a mis à notre disposition son bureau d’étude qui ont pris notre cahier des charge, l’ont rendu plus « pro » et ont travaillé avec les différents agents qu’ils avaient en Asie pour identifier plusieurs usines capables de produire nos ballerines enroulables. Après avoir comparé les échantillons reçus (gratuitement) nous avons sélectionné deux usines, toutes deux basées en Chine, et nous avons été les visiter. Notre choix s’est porté sur une usine, près de Shanghai. Propre, pro, où AUCUN enfant ne travaille, où le rythme n’est pas effréné (nous allons parfois plus vite dans les locaux de Shoette lorsque nous préparons les commandes!) et où les prix, qui ont augmentés en Chine depuis au moins 5 ans, ne sont pas du tout de l’exploitation. Cette usine n’utilise aucune colle ni produit interdit sur nos ballerines. Tout est contrôlé par le Service Qualité du partenaire industriel qui nous soutient.

Ils ont été capables de réaliser notre prototype avec les matières et les objectifs de qualité souhaités, ils ont été d’accord pour des quantités petites, ils ont été d’accord pour les 5 tailles et non 3 (nous proposons du 34/35 et du 42/43, ce que peu de marques proposent), ils ont négocié les délais mais ont tout de même été plus rapide que les usines en France, et le tout à un tarif qui nous permet de proposer la Shoette mini à 15,00€ TTC en France. Alors oui, nous avons laissé de côté la piste du Made in France, à contre cœur, et nous avons igné avec cette usine, basée en Chine. Et grâce à eux, quelques mois plus tard, nous avons accueilli à Rungis des caisses estampillées « Shoette », avec un sourire d’enfant qui découvre un parc d’attraction pour la première fois. Et ce fut le début de la commercialisation des ballerines de secours Shoette, les plus petites commercialisées en France. 

Voilà comment une petite startup française, issue d’une école de commerce française, composée d’étudiants et de jeunes diplômés français qui ne connaissaient rien au monde de la chaussure, et qui avaient sincèrement envie de fabriquer leurs produits en France, s’est retrouvé à vendre des produits Made in China.

Mais tout cela, ce n’était que l’étape 1 de la Shoette Aventure…
Lire ici l’étape 2

 

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